Speaker 1: Seuls 11% des masses d'eau de la région sont en bon état écologique.
L'eau, un enjeu de société.
Une série spéciale de la Fédération des radios associatives en pays de la Loire.
Elsa Caillou: Les îles sont particulièrement vulnérables face aux changements climatiques et à la hausse du niveau marin.
Le projet collaboratif Odisseyeux apporte des informations et des réponses pour anticiper le
comportement géologique et morphologique de l'île-dieu, avec entre autres la sortie Le Chemin
Bleu, l'objectif faire prendre conscience des risques.
Elsa Caillou, ingénieure de recherche à l'Observatoire des sciences de l'Université de Nantes.
Speaker 3: La sortie Le Chemin Bleu, c'est un circuit au sein du Marais Salé qui permet de montrer à différents
endroits les niveaux que pourrait atteindre l'eau, soit en cas d'inondation, soit en cas de
submersion marine et de rupture du cordon du nerf.
On sait que le Marais Salé c'est évidemment une zone inondable, ça c'est une surprise pour personne.
En revanche, ce qu'on a un peu plus de mal à percevoir, souvent, c'est justement les risques
de submersion et de rupture de cordon dunaire.
Or, on s'est rendu compte que le marais salé, le cordon dunaire, est particulièrement fragile,
puisqu'il a été exploité au XIXe siècle, et qu'il y a une grosse partie du sable qui manque
aujourd'hui, ce qui veut dire que le cordon dunaire est particulièrement fragile et qu'il y
a des réels risques de rupture.
le niveau de la mer est suffisamment élevé pour vraiment venir attaquer la dune, mais aussi
éventuellement en cas d'inondation du marais, puisqu'on voit bien que quand il y a de fortes
inondations dans les marais de l'île, ça peut arriver qu'effectivement l'eau pluviale vienne
pousser tellement fort en arrière de la dune que ça l'amène à se rompre.
C'est quelque chose qu'on observe souvent au niveau de la pointe du but. mais qu'on pourrait
aussi éventuellement observer au Maraisalais.
En fait, ce que nous dit le GIEC et notamment le GIEC régional, c'est qu'au niveau des pays
de la Loire, il faut s'attendre à des pluies régulièrement plus intenses que ce à quoi on est habitué.
Et puis, en parallèle, on a la mer qui monte.
Ça, c'est une surprise pour personne non plus.
Donc voilà, maintenant, ça ne va pas aller en s'arrangeant, c'est sûr.
Et donc, il faut qu'on trouve des solutions pour s'adapter.
Elsa Caillou: Parole de Marais, c'est un projet art-science qui vient conforter les travaux déjà existants
au sein du programme Odyssey Hill.
Speaker 3: C'est un joli projet qui vise à installer un certain nombre d'oeuvres de manière plus ou moins
pérenne dans le bassin versant du Marais. et ces œuvres auraient vocation soit à expliquer les
phénomènes, soit même à participer à les étudier.
Donc ça peut être par exemple quelque chose qui va permettre d'observer la biodiversité qui
passe entre la mer et le marais.
On sait qu'il y a des espèces qui sont capables de transiter.
Ça pourrait être une œuvre d'art qui permettrait non seulement d'expliquer, mais aussi de voir comment ça fonctionne.
Elsa Caillou: Elsa Acario participe également à l'aire marine éducative et au projet au fil de l'eau avec
le comité de développement de l'agriculture de l'Île-Dieu.
Speaker 3: Ces actions qui sont toujours à la fois scientifiques et à la fois collaboratives qui font intervenir
les agriculteurs, les riverains, les scolaires. de manière à ce que ce soit vraiment tout le
monde qui participe à l'acquisition de données et qui comprenne mieux ce qui se passe, comment ça fonctionne.
Et parce qu'on part du principe que plus collectivement on comprend comment les choses fonctionnent,
mieux après on les gère.
La gestion de l'eau à l'île d'Yeux, je pense que la première étape est franchie, c'est-à-dire
que plus ça va, mieux on comprend comment fonctionnent les choses. mieux on comprend qu'il faut
effectivement prendre l'ensemble des bassins versants quand on veut régler un problème, c'est-à-dire
si on a un problème d'érosion sur la plage, finalement il faut vraiment considérer que ce problème
en réalité il a pour cause certainement des choses qui sont aussi plus loin dans le bassin versant,
plus haut et éventuellement des choses aussi plus en aval et donc il faut considérer l'ensemble
du système Je dirais que ça, c'est quand même une première étape hyper importante et que tant
qu'on n'a pas compris ça, on est toujours un petit peu bloqué et on ne fait que mettre des pansements
à droite et à gauche.
Maintenant, c'est sûr qu'il y a encore beaucoup de choses à faire.
Il y a énormément de fossés, de mars qui ont été bouchés et pour lesquels il serait utile de
réviser vraiment le réseau hydrographique de l'île. C'est en cours.
Pensée locale, un enjeu de société.
Elsa Caillou: Dans le cadre du projet Au fil de l'eau, le collectif agricole de Île-Dieu a subventionné l'institut
polytechnique Unilassal pour réaliser une étude globale sur les ressources en eau superficielle
et souterraine à l'échelle de Île-Dieu.
Mickaël Goujon ayant travaillé pour Unilassal jusqu'en août 2023 en qualité d'enseignant chercheur
en hydrogéologie, site sol pollué, bonjour.
Mickaël Goujon: Oui bonjour tout le monde, bonjour.
Elsa Caillou: Qu'entendez-vous par ressources en eau superficielle et souterraine ?
Mickaël Goujon: Sur l'île d'Yeux, il faut avoir en tête que c'est un tout petit domaine qui est entouré d'eau salée.
Et en fait, la pluie qui va s'infiltrer en profondeur va créer ce qu'on appelle une lentille,
une lentille d'eau douce qui va se retrouver piégée au sein même des roches et qui va être potentiellement
en lien avec la partie superficielle que les gens connaissent généralement bien, fossés, ruisseaux et ainsi de suite.
Elsa Caillou: Avec quelle méthode avez-vous travaillé ?
Mickaël Goujon: Avec nos étudiants et Pascal Lutz, ma collègue qui est géophysicienne, on est parti sur deux méthodes assez distinctes.
La première, on a utilisé ce qu'on appelle de la géophysique.
On a utilisé la méthode de la résistivité électrique.
Pour faire simple, on a injecté un courant électrique dans le sol par le biais d'électrodes
et on a analysé la réponse de ce courant qui avait été injecté.
Cette partie-là nous permet d'estimer, alors déjà confirmer les roches qui sont sous nos pieds,
qu'on a pu entrevoir par le biais de la carte géologique locale.
Ça nous permet aussi de voir le degré d'altération des roches, leur degré de fracturation, et
si elles contiennent ou pas, enfin oui ou non, de l'eau douce et ou de l'eau salée.
Et typiquement, si on est dans de l'eau salée, on va avoir une résistivité très faible, l'eau
salée étant très bonne conductrice de courant.
Elsa Caillou: — Est-ce qu'il y avait beaucoup plus d'eau douce ou d'eau salée ?
Mickaël Goujon: — Alors, à l'échelle de Lille, il faut savoir qu'on a travaillé avec les étudiants à proximité
des puits communaux et privés qui avaient été référencés.
Et donc finalement, dans les zones où on a été, on peut dire qu'il y a plus d'eau douce.
Elsa Caillou: — Et la deuxième méthode, vous avez travaillé sur les puits.
Mickaël Goujon: — Effectivement. Donc quand on est arrivé sur Lille, la commune nous avait transmis un puits
qui référençait les puits communaux.
Donc il y en avait une trentaine à peu près.
Et en fait, le premier travail qui a été réalisé par nos étudiants, ça a été d'aller rencontrer
les gens pour cartographier les puits privés.
Et donc au bout d'une semaine de travail, ils en avaient déjà trouvé à peu près 120.
Sachant que vraisemblablement, il y en a encore un petit peu plus, parce qu'étant donné que
la mission s'est déroulée au mois de septembre 2020.
Il y avait beaucoup de maisons secondaires pour lesquelles on n'a pu rencontrer personne.
Donc voilà, 120 puits dans lesquels on a mesuré les niveaux d'eau, la température, la conductivité,
et puis à chaque fois on a fait des prélèvements pour aller faire des analyses au laboratoire d'Unilat à La Bovée.
Elsa Caillou: – Qu'est-ce que vous ont appris ces prélèvements et ces analyses ?
Mickaël Goujon: Alors déjà, ça nous a appris la rencontre avec les personnes, et puis le fait d'aller mesurer
les niveaux d'eau dans les puits nous a appris beaucoup de choses au niveau des usages.
C'est-à-dire qu'en fait, au niveau des puits, des 120 puits qu'il y avait, certains puits étaient
utilisés pour l'arrosage des jardins, par exemple, certains pour les habitations, ou d'autres,
des usages qu'on préfère pas privilégier, rejet d'eau usée, et ainsi de suite, voire comblement
des puits avec des matériaux divers et variés.
Voilà un petit peu l'état des lieux.
Et finalement, les résultats nous ont montré que...
Alors, on ne recherchait que les paramètres type nitrate, chlorure et ainsi de suite.
C'était vraiment orienté sur le côté eau douce ou eau salée des puits.
Et finalement, la majorité des puits qui sont référencés sur l'île contiennent de l'eau douce.
Ceux qu'on a retrouvés avec de l'eau salée, ce sont ceux qui sont très proches de la côte et
qui ont été contaminés, par le temps, soit par les usages, par l'eau de mer finalement.
Elsa Caillou: Est-ce que l'eau de ces pluies évolue ?
Mickaël Goujon: Disons que l'étude que nous on a menée était vraiment très orientée eau douce, eau salée.
Donc on n'a pas fait d'analyse de type pesticides, hydrocarbures ou même produits qu'on pourrait
retrouver sur les eaux usées.
Donc finalement, de notre point de vue par rapport à l'objectif que nous on était fixé, on peut
dire que la qualité est plutôt bonne. sachant que l'objectif final de cette étude, c'était d'imaginer
que les agriculteurs locaux, qui sont présents sur l'île d'Yeux, puissent ou non utiliser l'eau
des puits, l'eau de l'île d'Yeux finalement.
Elsa Caillou: Alors, les agriculteurs agricultristes peuvent-ils utiliser l'eau de ces puits ?
Mickaël Goujon: Il faudrait de toute façon faire une analyse un petit peu plus poussée que ce qu'on a pu faire
sur l'île, mais c'est vrai que c'était un des axes de travail et l'eau est disponible de toute
façon. sur l'île, à proximité des zones sur lesquelles on a travaillé, et notamment sur lesquelles
il y avait de l'activité agricole.
Après, pour savoir si elle est utilisable ou pas, il faut aller un petit peu plus dans le détail,
mais en tout cas, en termes de quantité, on peut dire que ça pourrait être envisagé d'être utilisé
par les agriculteurs, notamment sur l'île.
Elsa Caillou: Dans un avenir plus ou moins proche, y a-t-il des risques que cette ressource devienne moins
abondante sur l'île d'Yeuf ?
Mickaël Goujon: Alors en fait, c'est exactement le principe de l'idiot, c'est ce que je vous ai expliqué au départ.
La lentille d'eau douce, donc vous êtes sur une idiot, on peut considérer ça comme une éponge
ou une espèce de coquille de noix, entourée d'eau salée.
La différence de densité entre l'eau douce et l'eau salée crée cette lentille d'eau douce et
donc forcément, cette lentille d'eau douce va être contrainte par les besoins qu'il y aura sur cette dernière.
Donc si elle est utilisée pour l'arrosage, pour la consommation et ainsi de suite, et aussi
sera contrainte par la pluviométrie qui va permettre d'alimenter cette ressource en eau.
Voilà, avec des années comme 2022 qui ont été particulièrement sèches, forcément cette ressource-là,
cette lentille de douze, va être forcément très sujette à diminution.
Et puis si on l'utilise de façon, comment dire, exagérée, finalement on arrivera à ce que l'eau
salée imprègne tous les sols et notamment le souterrain.
Elsa Caillou: Donc vous pouvez pas nous dire si cette ressource va se tarir dans 10, 20 ou 30 ans ?
Mickaël Goujon: On pourrait envisager, mais on rentre dans de la modélisation, des modèles prédictifs qui pourraient
nous permettre d'essayer de calculer ça, mais il y a encore beaucoup beaucoup d'incertitudes,
notamment par rapport à la présence d'autres ouvrages, et puis surtout la consommation qui en
est faite, les besoins qui sont associés à cette utilisation d'eau souterraine. où là, pour
le coup, on a beaucoup, beaucoup d'incertitudes.
Aux doigts mouillés, pas sûr que la réponse puisse être scientifiquement acceptable, on va dire.
On a fait cette étude-là sur une autre petite île qui est dans le golfe du Morbihan, qui s'appelle l'île d'Arr. En Bretagne ?
Les deux font partie de l'association des îles du Ponant, donc c'est toutes les îles qui sont
référencées sur la côte ouest, et puis quand on monte vers la Bretagne, elles sont au nombre de 15.
Et donc c'est une problématique qu'on avait déjà initiée sur l'île d'Arc, qu'on a reproduite
sur les lieux, et puis qu'on avait pour projet de reproduire sur d'autres îles.
C'est vraiment des contextes locaux, des contextes insulaires, avec des ressources qui sont extrêmement limitées.
Elsa Caillou: Limitées car c'est un territoire clauf.
Mickaël Goujon: Voilà, exactement. Si on va côté continent, forcément c'est des réservoirs beaucoup plus grands,
différents, parfois beaucoup plus profonds, donc avec d'autres problématiques forcément.
Elsa Caillou: Les conclusions de ce mémoire d'initiative à la recherche de ces quatre étudiants en troisième
année d'ingénieur en géologie et environnement sont-elles disponibles sur internet, Michael ?
Mickaël Goujon: Toutes les documents qu'on a fournis, que les étudiants ont fournis, sont disponibles auprès
de l'association Au fil de l'eau, qui nous a financés.
Et puis l'université de Nantes, qui était aussi notre financeur.
Et globalement on va dire que ces études n'ont d'intérêt que pour les personnes qui savent les lire.
Elsa Caillou: Mickaël Goujon, ancien enseignant, chercheur en hydrogéologie, site et sol pollué à Uniassal, merci beaucoup !
Mickaël Goujon: Merci, bonne journée !
Elsa Caillou: Les résultats de différentes études sont en ligne sur audiceyeux.org, slash ressources, Laurent,
Radio-Neptune et Femmes, l'île d'Yeuf.
Speaker 1: C'était l'eau, un enjeu de société.
Une série spéciale de La Frappe, en partenariat avec Terre des Sciences, avec le soutien de
la région des Pays de la Loire.